Le Dicton du jour :
« Il pleut au jour des Saintes Reliques et vente à décorner les biques, mais souvent le grand Saint-Martin pour trois jours sèche le chemin. »
Bistro Volnay
Bistro |75002 PARIS
Le nom laissait augurer d’une belle aventure. Malheureusement ce fut une méprise.
Ce n’est pas un bistrot, c’est un restaurant vieillot. La différence est de taille. Le cadre est confit. La cuisine est bien faiblarde.
Et les nombreux cadavres de belles bouteilles qui occupent les étagères accroissent la sensation de malaise. Ils veulent nous faire croire que ce lieu a été joyeux et plein de vie… mais ne font que souligner l’ambiance funèbre qui s’est emparée de l’endroit.
Le service fait ce qu’il peut. On lui pardonne.
L’addition se veut raisonnable mais cela ne compense pas.
On est heureux de s’en aller.
Oscar et Thibault
Bistro Volnay
8 rue Volney
75002 Paris
Five O’Clock, GoûThé, deux reines gourmandes et un nouveau repas presque vespéral
Voilà qu’en cherchant une autre chose dans Quand la cuisine fait date, je suis tombé sur cela : 1660 : Catherine de Bragance impose le thé et la confiture aux Anglais. Et le texte : «Introduction en Angleterre du thé et de la confiture, rien que ça. En effet, la dot de la reine Catherine de Bragance, mariée à Charles II d’Angleterre, éblouissait par ses deux villes ; Tanger et Bombay. Mais ces offrandes réellement princières transformeront moins la culture britannique que les ingrédients basiques du five o’clock tea. Et last but not least, l’apport de l’ombrelle, amusant accessoire de la toilette de Catherine, que ces parages si humides transformèrent en parapluie. Doux détail: la confiture nuptiale était aux coings, une spécialité portugaise. Les Britanniques préférèrent l’élaborer avec des oranges amères ».
Visionnaire, en 1657 un tel Thomas Garraway transforme son café (Coffee House) en salon de thé et des affiches vantent le thé comme « une pratique encore méconnue du peuple ».
Mariée avec pompe et thé (pas pompette, quoique la théine…) mais le 3 mai 1662 car il y a eu pour deux années de tractations, le Portugal venant de prendre son indépendance eu égard de l’Espagne et les Anglais cherchant des colonies et des affaires en Asie, Catherine échouera à donner un héritier au trône quoique bien remplacé dans ce sens par Charles II (ou plutôt par ses nombreuses et prolifiques maîtresses, dont l’une a été faite dame de compagnie de la reine).
Reine détestée par les Anglais avec une haine pas très catholique due précisément aux bons rapports de Catherine avec le Vatican, Catherine a été au contraire bien aimée des colonies. Au point que le baptisme de Queen, aujourd’hui l’un des cinq arrondissements de New York a été un hommage à la Queen Portugaise.
Veuve, Catherine a réussi un retour au Portugal (comme des siècles après ce Manuel Valls dont la carrière politique interrompue en France l’amène à tenter la mairie de Barcelone), triomphal car elle finit régente avant d’en finir pour de bon le 31 décembre 1705, n’osant pas entamer l’année 1706.
Bien sûr, il n’aurait pas suffi d’amener du thé dans les bagages sans en importer le rituel. C’est pour cela que lui a été attribuée la pratique quotidienne de la consommation et on lui donne le titre extra officiel de « Première Drinking Tea Queen du Royaume Uni ».
Comment ne pas se souvenir donc, dans le même XVIIème siècle, de l’introduction d’une autre boisson cérémonieuse, le chocolat à la tasse, dans la cour française ? Et là aussi en conséquence d’un mariage.
En effet, en 1615, Anne d’Autriche (1601-1666), infante d’Espagne et du Portugal, enfant tout court, à ses 14 ans, arrive à son mariage avec Louis XIII avec son véritable amour, le chocolat qui, un siècle avant Hernan Cortès, courageux, avait bu dans un récipient en terre cuite, en prenant une, de cuite, car assaisonné de piment et de champignons hallucinogènes. Les bonnes sœurs étant passées par là en enlèvent champignons et chiles, présumés excitants sexuels, et en adoucissent la préparation au miel, la préparation est devenue courtoise à la cour, sans toutefois empêcher que la rumeur lui adosse des supposées vertus viagra avant la lettre.
En réalité, plus que comme épouse de Louis XIII c’est en tant que mère (de Louis IV rien de moins) que la d’abord veuve régente et après reine mère imposera une sorte de quatre heures chocolatées, dont l’un des addicts sera plus tard Louis XV, capable d’en préparer lui même sa drogue.
Et voilà qu’en passant du Five o’clock tea au Quatre heures, j’arrive à l’objet du désir : au San Régis*, coquet, discret et charmant hôtel parisien, vers 16h se bousculent et la définition du mot repas et la succession adéquate des temps alimentaires, puisque le gastronome parisien, harcelé par les petits déjeuners dégénérés en brunch et devenus rendez-vous d’affaires, pour les déjeuners gastronomiques et/ou de travail (l’un n’empêche pas l’autre) et prolongés par la résurgence de l’apéro vespéral suivi du dîner, doit maintenant assumer la théndance (oui, c’est délibéré) croissante mais sans croissant, quoique avec des madeleines, qui proposent de placer un plus que généreux nouveau repas.
« À la française », a baptisé son goûter le San Régis qui a donné même son nom à la complexe et délicieuse infusion (fleur d’hibiscus, thé grec, pomme sèche, verveine, fleur de bruyère…). Mais la Française est surtout l’autrice, c’est à la cheffe Jessica Préalpato, à laquelle il serait réducteur de la nommer cheffe pâtissière.
Puisque sans parler d’un gratin dauphinois clandestin réussi haut la main devant une tablée de cuisiniers, déjà les desserts qu’elle confectionnait dans le Plaza Athénée (période Ducasse nature, auquel Préalpato a ajouté un livre) se démarquaient d’un genre qui revienne de tant d’excès (trop de sucre, trop de gras, trop de crèmes) comme du mépris et/ou les craintes (la ligne !) aux restaurants gastronomiques.
Surtout quand le moment des desserts est précédé par un long menu dégustation.
Un mouvement des années 1990 (le repas tout dessert de Philippe Conticini à sa Table d’Anvers ; les desserts aux petits légumes de Nice concoctés par Bruno Cirino au Royal Monceau, les avant desserts d’Albert Adrià au Bulli…) n’a pas pu se généraliser, les clichés (« pour tomber en enfance ») et les beautés sur assiettes maquillées pour instagram, étant trop forts.
Mais celui qui avait connu les desserts de Préalpato, surtout les créations de l’automne, des fins de repas couleur sépia, des saveurs profondes qui appelaient et amertumes et acidités tout en incorporant le potager et le jardin mais dans les rôles principaux et non plus comme des ornements, va retrouver tout cela au San Régis. Mais puissance dix.
Au San Régis et sous la baguette (quel nom plus approprié !) d’un « maître d’hôtel goûter », comme se présente non sans ironie Christophe Granier, un repas en trois étapes va voir se succéder Les fruits frais, La Boîte à gourmandises (scone Reine-des-Prés, Pancake à l’épeautre et au soja fermenté de chez Mama Grana, Sablée à la farine de soja, anis vert et zestes de citron), Les 3 Condiments (miel de Miellat corse de Serge Frigara, crème crue et pamplemousse corse, figue et immortelle) et Les choux (2) graines de courge de la maison Valconie, courges soufflées poivre noir Voatsiperirfery, qui clôturent le premier service.
Le deuxième, aussi somptueux que d’abord simple, c’est La Tarte: poires de chez Yannick Colombié, thym citron, citron noir et Ajwain de la Maison Shira.
Et pour finir, dans un registre plus dessert comme pour donner à voir qu’il s’agissait d’un repas, on commence par Le dessert à l’assiette (Coings confits et fermentés au son d’orge, bière cuvée des moissons Deck et Donohue, grenade) et on épilogue sur la plus sincère et sans façons des tartes chocolat : Le gâteau. C’est à dire, du chocolat Sao Tomé de Nicolas Berger, pâte de cacao et puxuri râpé, glace au lait fermier de Kerbastard.
Tout cela enveloppé par la justesse technique, la légèreté tout en constituant un vrai repas gourmet.
Enfin, quoique d’après la formule convenue on ne mange pas les rideaux, il faut noter comme atout le calme des lieux, l’aimable efficacité de la salle et la sensation d’être des hôtes à demeure, dans un moment gastronomique hors temps.* Hôtel San Régis. 12, rue Jean Goujon 75008 Paris.
Tél.: 01 44 95 16 16. Le Goûter à la française 65€/personne.Post-scriptum. De la morue au Guggenheim Bilbao et de ma consœur Blandine Vié
Admiratif toujours devant les choix de sujets et le talent pour les traiter, de ma consœur Blandine Vié, à qui je compte dédier en grande partie mon prochain billet (écrit avec les tripes car elle publie un impressionnant Tripes & boyaux) je partage avec elle l’amour pour un produit parfois clivant : la morue.
Sur ce poisson devenu clé pour nourrir les gens, même dans les terres les plus éloignées de la mer, grâce à la bénédiction du Vatican, Blandine a pondu en 2001, chez notre commun et disparu éditeur Jean-Paul Rocher, un impeccable La Morue entre sel et mer, et cela dans la même année où avec le peintre Ricardo Mosner j’avais commis un Morues profondes, chez Le Zouave Éditeur.
En hommage à ce presque quart de siècle de prose salé et puisque nous sommes un 7 novembre, voilà que ce soir, dans les tripes du Guggenheim de Bilbao, ce musée sans collection conçu par Frank Gehry, le bistrot annexe au Nerua Guggenheim Bilbao et sur lequel veille aussi l’étoile et excellent chef Josean Martinez, propose une époustouflante soirée morue.
Pour à peine 52€ vous pouvez déguster une master classe à l’assiette, car les Bilbainos ce sont des maîtres ès morue.
Le menu commence avec trois apéros déjà dans la succulence. Après se succèdent cinq plats y compris deux des classiques du Nerua, le resto étoilé, et enfin un dessert gourmand. Dans les verres, un vermouth, un mousseux et un vin, tous locaux.
En sus, de noms de plats ou sauces de tradition, en euskera (basque) capables de faire saliver ceux qui les déchiffrent. Par exemple, txangurro (araignée de mer), zurrukutuna (plat composé: de l’ail, du piment, de poivron vert, de la morue, du pain grillé et un œuf), kokotxas (joues de merlu), mamia (caillé) et cette sauce vizcaína (biscaîen),avec le pil pil drapeau de toutes les morues.
Oscar Caballero est journaliste culturel, chroniqueur gastronomique et auteur. Notamment de « Quand la cuisine fait date”.
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Les produits de saison
Les produits que l’on peut légitimement trouver sur nos tables en cette saison.
Le panais
C’est bien sûr un légume racine au même titre que la carotte ou le céleri. Il a une saveur douce, légèrement sucrée et épicée. J’avoue que parmi les légumes oubliés, il a ma préférence… à mélanger avec des pommes de terre et des carottes pour obtenir une purée exceptionnelle (avec beaucoup de beurre bien sûr comme nous l’a enseigné le regretté Joël Rebuchon !).
Aloyau
Sur le dos du bœuf, on nomme aloyau la partie qui va de la dernière côte au sacrum ; elle se divise en filet, faux-filet et romsteck. On la fait rôtir ou braiser. C’est de l’aloyau que l’on tire les biftecks.
(Source : dictionnaire de l’académie des gastronomes)








