Le Dicton du jour :
« Pour la Sainte-Berthe (4 juillet), moisson ouverte. »
Le Severo
Bistrot|75014 PARIS
Il y a longtemps que William, boucher-restaurateur, a pliĂ© le match consistant Ă savoir quel est le meilleur restaurant de viande de Paris. Ă ce niveau, ce nâest plus un mĂ©tier mais une vocation. Sa passion est intacte. Au Severo on dĂ©guste des viandes que lâon ne trouve nulle part ailleurs. Une succession de merveilles et il est difficile de choisir. Ălu meilleur steak tartare depuis longtemps, il a plus dâun tour dans son sac.
La terrine est exceptionnelle et lâonglet Ă©tait parfait⊠le tout est portĂ© par un service en totale complicitĂ©. Et Ă miracle, lâaddition est trĂšs raisonnable.
Bref il faut mieux réserver au risque, justifié, de se casser les dents.
Oscar et Thibault
Le Severo
8 rue des plantes
75014 Paris
La France à Table, la responsabilité individuelle et notre aïeule, Catherine Duchemin, peintre
On savait dĂ©jĂ quâon est fait de ce quâon mange. Le poĂšte Francisco Quevedo (1580-1645) parlait de nourriture de Dieu, pour dĂ©finir les tourtes «car Dieu seulement sait ce quâil y a dedans». On peut dire pareil aujourdâhui dâune bonne partie des aliments industriels, sans parler de ceux destinĂ©s aux bĂȘtes qui vont nous alimenter aprĂšs.
De quoi est fait donc un Français actuel, nourri au supermarché ?
Comme Jean JaurĂšs a Ă©tĂ© tuĂ© en dĂźnant, la prĂ©occupation de la Fondation Jean JaurĂšs par «notre rapport Ă lâalimentation» est la bienvenue et incite Ă lire la 2Ăšme Ă©dition de La France Ă Table, «sâappuyant sur les donnĂ©es issues pour la plupart dâenquĂȘtes de LâObSoCo», lâObservatoire SociĂ©tĂ© et Consommation, pour «suivre, comprendre et mesurer comment Ă©voluent les prĂ©occupations, les reprĂ©sentations, les attentes, mais aussi les contraintes et donc les pratiques alimentaires des consommateurs».Quelques donnĂ©es.
âą 57 % des Français considĂšrent que leur alimentation leur procure du plaisir â un recul sensible par rapport aux annĂ©es prĂ©cĂ©dentes (-16 points depuis 2016). Le plaisir de manger sâĂ©rode, signe dâun rapport plus contraint aÌ lâalimentation.âą 37 % dĂ©clarent devoir restreindre leurs dĂ©penses alimentaires pour des raisons Ă©conomiques ; 11 % Ă©voquent des restrictions importantes. Un Français sur dix est confrontĂ©Ì aÌ une vĂ©ritable prĂ©caritĂ© alimentaire.
âą 43 % dĂźnent seuls aÌ la maison, contre 29 % vingt ans plus tĂŽt. Le repas partageÌ se dissout progressivement dans les pratiques individuelles.
âą 60 % se disent prĂ©occupĂ©s par lâimpact des aliments quâils consomment (+4 points par rapport aÌ 2021). Pourtant, lâattention rĂ©ellement portĂ©e aÌ ces effets diminue â une dissonance entre intentions et contraintes.
âą Un Français sur trois suit un rĂ©gime alimentaire spĂ©cifique (sans viande, sans gluten, flexitarienâŠ). Les pratiques se personnalisent, traduisant une autonomie accrue vis-aÌ-vis des normes collectives.
âą 40 % estiment que la qualitĂ© des produits alimentaires sâest dĂ©gradĂ©e en cinq ans ; 22 % jugent quâelle sâest mĂȘme fortement dĂ©gradĂ©e. Une dĂ©fiance croissante envers lâoffre, nourrie par lâexpĂ©rience directe et un sentiment de dĂ©classement alimentaire.
âą 69 % estiment que les marques de distributeur (MDD) offrent une qualitĂ© Ă©quivalente aÌ celle des grandes marques. Un basculement silencieux, mais profond dans les repĂšres de confiance et de qualitĂ©.
âą 70 % des femmes dĂ©clarent assumer seules les courses et la prĂ©paration des repas. Le poids du quotidien alimentaire continue de reposer massivement sur les femmes, rĂ©vĂ©lant des inĂ©galitĂ©s genreÌes persistantes.
âą 53 % des Français passent moins de trente minutes aÌ table, contre 38 % en 1999. Le temps du repas se comprime, sous lâeffet du rythme quotidien et du manque de disponibilitĂ©.
âą 78 % estiment que «nous pourrions vivre en mangeant beaucoup moins». Un consensus inĂ©dit autour de lâidĂ©e de frugalitĂ©, entre choix volontaire, contrainte Ă©conomique et quĂȘte de santeÌ.
Le chemin de lâenfer Ă©tant pavĂ© de bonnes intentions il faut se mĂ©fier cependant de la valeur de ce type de recherches car dans le sujet on dit plus ce quâon voudrait faire que ce quâon fait. Une Ă©tude de Jean-Pierre Poulain, psychologue, sociologue (et ce qui nâenlĂšve rien, ancien Ă©lĂšve de lâĂ©cole hĂŽteliĂšre de Toulouse), sur des pratiques alimentaires, centrĂ©e en foyers qui laissaient placer une camĂ©ra dans leur cuisine, avait rĂ©vĂ©lĂ© que des gens dĂźnant dâune pizza lâornaient, sans mauvaise foi, dâune entrĂ©e et dâun dessert, parfois aussi dâun fromage.
Un autre problĂšme quand on parle de nourriture, est celui des noms.
Du beurre, oui, mais au lait cru ou pas ? Huile dâolive, oui, mais par des procĂ©dĂ©s mĂ©caniques et consommĂ© dans lâannĂ©e ? Viande, oui, mais lâorigine ?
Je rĂ©pĂšte souvent le mot de lâĂ©crivain Manuel VĂĄzquez Montalban: «manger ou pas manger câest un problĂšme dâargent. Manger bien ce nâest pas une question dâargent».
Et dans ces temps de 5Úme gamme, quid du manger hors maison qui se réclame «maison».
Et dans ces temps dâincitations/accusations (bouger plus ; boire avec modĂ©ration ; manger bioâŠ), câest intĂ©ressant de faire appel Ă la science nuancĂ©e, car la santĂ© ne dĂ©pend pas seulement de notre code gĂ©nĂ©tique, de notre code postal.
«Quatre produits-, le tabac, les combustibles fossiles, lâalcool et les aliments transformĂ©s- provoquent entre 1/3 et 2/3 des morts dans le monde». La source est autorisĂ©e : Anna Gilmore, 57, professeur de SantĂ© Publique et directrice du Centre pour la SantĂ© Publique au XXIĂšme siĂšcle de lâUniversitĂ© de Bath, au Royaume-Uni.
Bien sĂ»r, Gilmore nâignore pas ni lâinnĂ© ni lâacquis. Mais elle refuse de centrer le problĂšme dans la conduite individuelle, «comme dans le cas de lâobĂ©sitĂ©, dont les causes sont beaucoup plus complexes, y compris celle de lâindustrie alimentaire et leur progrĂšs dans la mal bouffe addictive».
Lâargent et leur pouvoir infiniment supĂ©rieur Ă celui des Ătats «permettrait aux industries de financer un monde parallĂšle des entreprises Ă©cran et se servir mĂȘme des institutions bĂ©nĂ©fiques pour faire circuler des messages capables dâinfluencer pas seulement aux individus mais aussi et surtout aux dĂ©cideurs politiques».
Gilmore cite aussi le cas de lâindustrie du tabac, «dont les manĆuvres de dĂ©sinformation ont Ă©tĂ© mises en Ă©vidence dĂ©jĂ mais qui multiplient des entreprises Ă la façade scientifique, et des produits moins directement mauvais. Dans le mĂȘme dessein, les industriels de lâalcool produisent le sans alcool et des boissons peu alcoolisĂ©es pour gagner de lâargent aussi dans ce monde alternatif».
Bref, plutÎt Rabelaisiens conscients que modérés sous influence.
Et pour finir en beautĂ©, un saut en arriĂšre vers des Ă©poques oĂč manger câĂ©tait plutĂŽt hasardeux, tout temps de jadis ayant Ă©tĂ© pire.
En 1648 est créée en France lâAcadĂ©mie royale de peinture et de sculpture, vouĂ©e Ă la formation dâartistes ainsi quâĂ leurs promotion et protection. Et voilĂ que la premiĂšre femme admise (1663) câĂ©tait lâancĂȘtre idĂ©ale de notre guide, la peintre Catherine Duchemin (1630-1698). Heureuse dĂ©couverte dans une exposition, Sâhabiller en artiste-Lâartiste et son vĂȘtement que justifie (jusquâau 21 juillet) le dĂ©placement au Louvre-Lens.
Si Catherine Duchemin se montre lĂ en peintre, un genre dans celui de lâautoportrait, elle ne menace point le record de coquetterie du grand Rembrandt : 80 autoportraits !
Ni la cruautĂ© envers le public (et avec soi-mĂȘme peut-ĂȘtre) du franco-polonais Roman Opalka (1931-2011) qui en 1956 commence aÌ se photographier quotidiennement en noir et blanc aprĂšs chacune de ses sĂ©ances de travail. Sur toutes les images, il se tient face aÌ l'objectif dans la mĂȘme position, garde une expression neutre et porte la mĂȘme chemise blanche. Des milliers de jours composent cette sĂ©rie photographique dans laquelle seul le visage de lâartiste change avec les annĂ©es qui passent.
En termes culinaires, du faisandage.
Oscar Caballero est journaliste culturel, chroniqueur gastronomique et auteur. Notamment de « Quand la cuisine fait dateâ.
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Les produits de saison
Les produits que lâon peut lĂ©gitimement trouver sur nos tables en cette saison.Â
La mozzarella
On la trouve sur toutes les tables et dans presque toutes les salades. Mais Ă force de le copier ce produit est galvaudĂ©. PrivilĂ©giez la mozzarella si bufala campana. Elle est produite exclusivement avec du lait de bufflonne et provient des rĂ©gions de campanile dans le sud de lâItalie. Sa qualitĂ© est inĂ©galĂ©e.
Pommes de terre frites
Câest le plus populaire des plats français. Elles se subdivisent en pommes allumettes, Chatouillard (du nom dâun ancien rĂŽtisseur), chips (de lâanglais chip : copeau), en rondelles minces, paille, pont-neuf (deux fois plus Ă©paisses que les allumettes), soufflĂ©esâŠ
(Source : dictionnaire de lâacadĂ©mie des gastronomes)