Le Dicton du jour :
« À mi-mai, queue d’hiver, mais à Saint-Honoré (16 mai), que de pois verts ! »
Le Pergolèse - Julien Dumas
Restaurant gastronomique|75016 PARIS
Je connais Julien Dumas depuis de nombreuses années. C’est certes un cuisinier de grand talent mais c’est surtout un homme curieux qui ne cesse de poursuivre sa quête de perfection. Il a exploré le monde de la mer puis celui des légumes avec l’obsession d’en tirer le meilleur. Au Lucas Carton c’était un chercheur à la fois terriblement agité et sympathique, au Saint James la mue devenait visible et aujourd’hui c’est désormais un très grand chef, au sommet de son art que l’on a en face de nous. Avec Oscar nous venons d’y faire un de nos plus grands repas. Au déjeuner nous avons pris l’un des menus dégustations pour parcourir la carte. Chaque plat fut un enchantement. Les produits sont sublimés avec simplicité. Un sans faute !
Le tout avec un service très sympathique et des prix TRÈS raisonnables.
C’est l’adresse du moment et il faut en profiter.
Les choses se sont inversées, désormais c’est Julien qui parait calme et serein et nous, qui sommes surexcités…
Oscar et Thibault
Le Pergolèse - Julien Dumas
40 rue Pergolèse
75016 Paris
Dumas, vingt mois après. Qu'est-ce qui est nouveau ? Pergolèse !
En discutant récemment avec Pierre Hermé, pas seulement un grand pâtissier mais aussi et surtout un palais privilégié et un gourmet qui fréquente assidument les restaurants, on déplorait le manque de nouveauté des nouveautés, les poncifs -carpacci, leche de tigre et autres ceviches un peu partout ou bien « pâté-croûte » et vol-au-vent- et le peu d’originalité générale. Pour Hermé c’est clair : « le pire c’est le manque d’identité ».
Un restaurant doit être identifiable autant que sa salle et surtout chaque plat. Et pour cela il y a eu la nouvelle cuisine en faisant une seule personne du restaurateur et du chef.
Or, Paul Bocuse avait réussi à sortir le cuisinier de la cuisine et, c’est lui qui le disait, sans réussir à le faire revenir.
Un chef patron doit bien gagner sa vie mais l’idée de se dédoubler en sérial restaurateur demande d’autres talents et ne l’éloigne pas seulement de sa cuisine mais aussi de son restaurant gastronomique.
Dans tous les cas, le commensal assidu préfère le chef patron présent (l’âme de la maison) que l’ambassadeur de France en tournée mondiale.
Une autre préférence : si menu dégustation il y a, qu’il soit vraiment différent, particulier, plus propre à draguer les palais que les yeux (au contraire des plats instagrammables) et à anoblir les produits plutôt qu’à gestionner mieux les achats, ce qui fait partie des obligations de tout commerçant mais pas des préoccupations des clients.
Tout cela perd de l’importance cependant quand, à deux pas de la Porte Maillot, une assiette nous amène loin de Paris : omble chevalier et agastache, ce délicat poisson de lac et cette plante dont les fleurs exhalent de l’anis et les feuilles évoquent la menthe. Il est vrai que depuis les hors-d’œuvres de bienvenue et surtout cet asperge et pollen pour ouvrir bouche (l’asperge en trois saveurs et trois textures du talon à la tête crue) avaient imposé concentration et silence, mais sans court-circuiter les « oh, que c’est bon » murmurés.
C’était le Menu Dégustation en 8 services d’un revenant, Julien Dumas, installé dans les murs de Le Pergolèse*, murs repeints mais qui attendent la pause de l’été pour des sérieuses reformes en cuisine et en salle.
J’ai connu Julien Dumas au Rech encore en mains d’Alain Ducasse, sur une reprise des cuisines en mains du grand Jacques (Maximin) dont J.D. a subi et profité de la rigueur et du talent. Depuis, Dumas est passé chef chez Lucas Carton, quoique à la période chaotique du restaurant de La Madeleine, après le départ de Senderens, et arrivé plus tard au très british Saint-James toujours sans s’en enraciner.
Dorénavant chef patron rue Pergolèse, Dumas compte faire table rase du passé des lieux et du sien en tant que salarié, pour entamer une nouvelle vie en tant que chef, ce qui peut passer pour revitaliser l’agneau par le truchement d’une huitre, algues et blettes ou bien le dessert, quand les algues rouges poivrées œuvrent avec le chocolat.
De là cette sensation fugace, heureuse, d’être à la naissance d’un endroit, jumelle de cet autre : on reviendra.
En marchant, pas pour digérer mais pour penser (prescription d’Etienne Klein dans son Transports Physiques, Gallimard, 2025), j’ai fait un saut en arrière : un souvenir de ce type de joie de la découverte. C’était dans les premières semaines du Jamin que Joël Robuchon venait d’investir, sa première adresse en chef patron, surprise faite de minimalisme et de perfection. De l’épure, appliquée même à une purée.
Et avec cela le souvenir d’une discussion avec Robuchon. Á propos de je ne sais plus quel mets, j’ai nuancé : « mais cela n’est qu’un détail », lui me répondant ceci : « la cuisine n’est que des détails ».
Et voilà, les détails, chez Dumas, sont de taille.Enfin, pour clôturer cette promenade je saute en toute digression de restaurant en boulangerie : voilà une petite révolution dans l’offre pâtissière des boulangeries parisiennes, par trop routinier et en majorité industrielle. Depuis 2022 Le Temps et le Pain** a rajouté au bon pain bio une offre pâtissière qui se démarque, dont les niveaux et les strates de chaque pièce sont un défi à l’équilibre et une référence à la parenté que Carême trouva entre la pâtisserie et l’architecture.
Pour preuve le citron/basilic, un mini bâtiment de saveurs.
Mais le culmen c’est le riz au lait, avec son socle croustillant, le caramel beurre salé, puis le riz au lait. Un petit grand moment de gourmandise pure. Le travail de la cheffe, Carolina Bravo Lizana, chilienne de naissance, m’a apporté un autre souvenir pour ce billet : celui d’une variation argentine du riz au lait où le lait est poussé jusqu’à en devenir dulce de leche, ce cousin austral du caramel breton, quoique sans sa pointe du sel.* Julien Dumas au Pergolèse. 40, rue Pergolèse, 75016 Paris.
Tél. : 01 45 00 21 40 et 06 59 12 42 38. le-pergolese@wanadoo.fr Fermé samedi et dimanche. Menus : 50€ le déjeuner. 95€ et 125€. Carte : environ 100€.** Le Temps et le Pain. 7, rue Mouton-Duvernet, 75014 Paris.
Tél. : 09 80 53 68 36. Du mardi au dimanche. Tartelette riz au lait individuel : 7,40€ (et dix centimes de plus pour celle au citron basilic).
Oscar Caballero est journaliste culturel, chroniqueur gastronomique et auteur. Notamment de « Quand la cuisine fait date”.
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Les produits de saison
Les produits que l’on peut légitimement trouver sur nos tables en cette saison.
L’omble chevalier
Il y a 3 sortes de poissons qui portent le nom d’omble : l’omble commun, l’omble-chevalier et l’omble de mer. Ici nous parlons du deuxième. C’est un poisson de lac, qui vit en profondeur. Pas simple à pêcher il est d’une chair particulièrement fine. Un mets de choix.
Bette ou blette
Plante potagère encore appelée poirée. Elle s’apparente à la betterave et à l’épinard. Qu’elle soit en potage, en ravioli ou autre, on accommode séparément feuilles et côtes.
(Source : dictionnaire de l’académie des gastronomes)